Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

DISCOURS DE SEYNOD

24 Février 2014 , Rédigé par Jean Marc FONSECA Publié dans #Editorial

Quand on chemine sur un chemin muletier qui comme par chez nous négocie une pente abrupte par de nombreux lacets, il arrive qu'on s'arrête pour reprendre ses jambes et sa respiration. Alors, on regarde derrière soi pour jauger du chemin parcouru, et l'on regarde aussi la haut, là où sur un col ou sur une crête déboucheront nos pas. Ainsi on mesure l'effort que l'on vient de faire, et l'on se prépare mentalement à l'effort à fournir pour entamer une seconde étape. Il y encore quelques années, je désespérais. Je me comparais à ces vieux paysans de nos montagnes qui, jusqu'au crépuscule de leur vie, s'escrignent à entretenir et à cultiver un coin de terre pas très loin de leur maison. Une sorte d'acte ultime de résistance empreint de fierté dans un monde en train de mourir. Quand je racontais l'histoire de mon pays, quand je prononçais quelques paroles dans ma langue, je me rappelais ma jeunesse quand certains à table ou au bistrot faisaient comprendre aux vieux que leur histoire de guerre, de tranchées et de copains qui ne reviendraient pas commençaient à lasser. J'avoue en ce temps là, n'avoir pas compris la détresse de ceux dont on avait sacrifié les vingt ans. Nier cet épisode de leur histoire, c'était nier une partie de leur vie. A nous aussi en escamotant notre histoire, en ridiculisant notre culture pour l’appeler folklore, et en considérant notre langue comme une curiosité ou un patois, on avait nié une partie de notre vie et celle de nos pères. On peut ne pas transmettre à sa descendance ou à son prochain des biens matériels, on n'en meurt pas plus pauvre. Mais la pire des choses est de ne pouvoir transmettre l'esprit de sa terre. De rompre la noble chaîne entre un pays, ses ancêtres , son histoire, sa culture et les générations futures. Ce serait cela pour moi , mourir dans la misère.... Mais il est entrain de se produire quelque chose: le système d’organisation et de gestions de nos vies est devenu oppressif, il n’est plus en harmonie avec nos espérances ; il fait faillite et nous n’en voulons plus. Les idéologies dominantes de la fin du siècle dernier sont en train de perdre leur crédibilité entraînant la décrépitude des partis qui encore s'y rattachent. On nous traitait de passéistes, d’arriérés, de nostalgiques et voici que nous sommes devenus des nostalgiques de l'avenir. Nous ne sommes pas maître du temps de l'histoire, mais il semblerait que les événements s'accélèrent. Il y a maintenant prés de trois ans, lorsque nous avons, à un petit groupe, créé la FMCA, nous pressentions que nous étions sur le bon chemin, mais pour la plupart nous ne savions comment nous y prendre. Ce jour là, j'avais fait part à nos amis Suisses des Mouvements Citoyens de ma réticence à l'égard de ce que je considérais comme la politique politicienne ou institutionnelle et Eric Stauffer m'a dit : « Moi aussi une certaine façon de faire de la politique me dégoûte, mais quand la bonde et le siphon de la baignoire sont bouchés, il faut bien mettre les mains dedans, se mouiller et se salir pour la déboucher. » J'ai fini par comprendre et depuis l'eau s'écoule à nouveau. Aujourd'hui un certain nombre de nos analyses, de nos propositions, de nos mots d'ordre sont en train de passer, de transcender les partis politiques, d'être repris par bon nombre de responsables associatifs et d'élus de proximités. Les pratiques que nous avons mises en place commencent à payer. Nous avons passé le cap de réunir autour de nous seulement quelques originaux, militants des causes désespérées, et quelques individus en recherche d'utopie...ou de notoriété. Notre mouvement est devenu un interlocuteur, responsable, constructif, et reconnu. Nous n'avons pas pour autant changé notre discours par des compromis. Mais le travail de terrain commence à payer. Nous avons préparé le terrain, nous avons semé, biné pour enlever les mauvaises herbes, arrosé. Bientôt nous ferons nos premières récoltes et les futures seront encore plus prolifiques. On ne progresse que parce que l'on est à l'écoute des préoccupations de ses concitoyens, parce que nous analysons , reformulons et rendons ces préoccupations, ces aspirations, ces désirs aux citoyens sous forme de propositions politiques. Et vous savez lorsque nous marquons des points, c'est lorsque les gens nous disent : « C'est effectivement ce que nous voudrions pouvoir faire, mais dans le cadre des lois françaises, ou européennes ce n'est pas possible. » C'est comme cela que l'on donne à nos concitoyens et concitoyennes, l'idée d'exercer leur pleine souveraineté politique. Il faut donc que chaque mouvement citoyen devienne une force de proposition, s'inclue dans la vie politique, économique, culturelle et environnementale de son pays. Quel que soit la légitimité de nos droits historiques, rien ne se fera sans l'établissement d'un rapport de force et un rapport de force cela se construit à partir des réalités de terrain. Il faut aussi et surtout se débarrasser de l'esprit franchiman qui consiste à prendre comme référence la Droite ou la Gauche. Tenez, aujourd'hui dans cette assemblée, combien d'entre-vous, connaissaient de personnes qui sont décédée d'un cancer ? Ils étaient de gauche où ils étaient de droite ? Leur souffrance fut de droite ou elle fut de gauche ? La peine ou la douleur de leur proche fut de gauche ou fut de droite ? Ils ont finit dans un cimetière de Droite ou dans un cimetière de Gauche ? Les bonnes idées, les gens de talents, les préoccupations sociales, les préoccupations environnementales, les valeurs de solidarité, de partage, le besoin de protéger et d'assurer un avenir pour ses enfants, ne sont pas plus des idées de gauche que des idées de droite. Car ces notions de Gauche ou de Droite, n'ont en aucun cas existé ou prévalu dans nos pays avant l'invasion française. Le municipe, l'élection par tirage au sort de notre parlement, les citées républiques, l'égalité des citoyens quel que fut leur sexe ou leur religion, les monts de piété en grain, la solidarité envers les plus démunis avec les confréries de pénitents autonomes vis à vis du clergé, l'autonomie politique des communes, les biens communs et les droits d'usages au dessus du droit de la propriété privée, les impôts et les taxes décidées aux vu et su de tout le monde par nos assemblées communales, la justice accessible à tous avec l'institution de l'avocat des pauvres, la liberté du commerce avec notre port franc, la liberté de passer des traités commerciaux bi-latéraux, tous cela, nous en disposions dans "la Countèa de Nissa" avant l'invasion française qui supprima soit disant les privilèges. Nous n'avions pas attendu la France pour inventer la République et la Démocratie. Alors, oui, aujourd'hui, nous sommes les nostalgiques de l'avenir. Vous pensez que sur le Continent Européen, il est possible de recréer un ensemble de territoires, libérés de l'Europe de Bruxelles et de la dictature de l'Euro ? Un territoire dont les peuples partageraient des valeurs et une histoire commune de plusieurs siècles ? Vous pensez qu'il y est possible d'y rétablir la Démocratie ? Vous pensez que chaque participant pourra y rétablir ses langues et sa culture ? Que les prochaines générations y apprendrons la véritable histoire de leur pays et non les affabulations du roman historique que les puissances de tutelles leur impose ? Vous pensez qu'il est possible d'établir un mode de développement économique et un aménagement du territoire qui ne soit pas décidé par la Troïka de la BCE ou les décideurs de Wall Street ? Vous pensez que c'est aux citoyens et citoyennes de décider de leur destin et de la vie de leur territoire ? Vous pensez qu'il est préjudiciable de continuer à faire confiance à des partis dont le référent reste ancré dans les idéologies dépassées droite-gauche ? Vous penser que ce que l'on vous impose n'est pas inéluctable ? Alors comme nous disons à Nice, peut-importe d'où tu viens, l'important est ce que nous pouvons faire ensemble pour ce pays, si tu l'aimes autant que nous l'aimons. Bienvenu à Seynod, bienvenu à la Fédération des Mouvements Citoyens de l'Arc Alpin.
Bienvenu chez-vous.

 

Jean Marc FONSECA
Président du MCPN

 

 

580887_3990815537636_1352317459_n
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article